Résumé

Inflation, ruptures d’approvisionnement, flambée des taux d’intérêt, retournement de conjoncture, restrictions de crédit, pénuries de personnels sont les risques actuels les plus prégnants qui menacent actuellement les entreprises.

Pour s’en protéger efficacement, elles doivent traiter ces menaces au regard de leurs fragilités intrinsèques. A cet effet, un diagnostic limité tel que décrit ici, peut être plus rapidement réalisé qu’un diagnostic intégral pour dégrossir le problème et apporter les premières mesures d’urgence. Cela ne dispense pas d’approfondir ultérieurement l’analyse pour définir un plan à moyen terme donnant lieu à une quantification des pertes et de bénéfices potentiels et à la mise en œuvre d’une transformation structurelle apportant des gains plus substantiels et pérennes.

Nous nous intéressons ici, comme dans tous nos autres articles, au segment des entreprises de taille moyenne ou intermédiaire indépendantes (ETMI), employant 200 à 2000 salariés.

La plupart de ces ETMI sont des structures ayant atteint un certain degré de complexité, ce qui limite la connaissance des arcanes de leur fonctionnement par leur management. Dès lors, il est plus difficile pour ce dernier d’y voir parfaitement clair en cas de problèmes de performance économique et de réagir sans coup férir en actionnant les leviers les plus efficaces. Il lui est d’ailleurs tout aussi difficile de définir la meilleure marche à suivre face aux actuels risques externes arrivés en cascade ces derniers temps et auxquels peu d’entreprises échapperont.

Incidence des 6 risques externes majeurs actuels

Nous voyons en effet se confirmer 6 menaces majeures qui doivent être prises en considération de façon très sérieuse dans le contexte agité que nous subissons. Il s’agit de l’envolée de l’inflation (matières, énergie, services essentiels, devises), des ruptures d’approvisionnement (composants, énergie, etc.), de la flambée du taux d’intérêt, de la détérioration de la conjoncture, des restrictions de crédit et des pénuries de personnels. Ces risques exogènes vont en fait être exacerbés par les possibles fragilités (endogènes) préexistantes de l’entreprise dans les 7 domaines de la stratégie, de l’offre, de sa commercialisation, des opérations pour la produire et l’acheminer jusqu’au client, de l’organisation interne et de la gestion des ressources humaines, de la dynamique du leadership au sein de l’équipe de direction, et enfin, du contrôle financier interne doublé de celui exercé par la gouvernance.

Importance des effets croisés

Dans les cas d’insuffisance ou de risque de détérioration de la performance économique, nous recommandons généralement un Diagnostic Intégral, qui permet de faire toute la lumière sur l’origine des problèmes et leur articulation, Il est possible toutefois de se contenter d’un Diagnostic Limité pour dégrossir la situation et identifier les actions les plus urgentes à entreprendre. Si ce diagnostic est bien mené, dans les conditions décrites par exemple dans notre article précédent sur le sujet, il permet d’offrir des réponses approximatives mais rapides au prix d’une plus faible profondeur et d’une précision moindre.

Dans ce cadre, il s’agit d’évaluer, sans passer par l’analyse fine de la data menée dans le cadre d’un diagnostic intégral, les possibles vulnérabilités intrinsèques de l’entreprise relativement aux 7 domaines précédemment évoqués, d’une part, et sa sensibilité/exposition par rapport aux 6 risques, d’autre part. Mais il faut noter qu’en réalité, ce sont les effets conjugués qu’il est indispensable d’examiner afin de jauger correctement la situation.

On pourra ainsi, fort de cet éclairage, échafauder le premier train de mesures permettant d’éloigner le spectre d’une chute brutale de la rentabilité et du cashflow dans les prochains mois.

Il convient cependant de noter au passage que les effets mutuels de résonnance des fragilités internes et des risques externes ne sont pas homogènes. Ainsi certaines cases du tableau d’évaluation ci-contre sont plus proéminentes que d’autres. Par exemple, une hausse de l’inflation a normalement plus d’impact en situation de stratégie défaillante que lorsque ce sont les opérations qui ne sont pas bien optimisées. Elle est également très difficile à gérer lorsque l’offre de produits est trop riche et indûment complexe.


Application de la méthode

Prenons maintenant pour illustrer cette méthode deux cas de figure correspondant à des situations assez dissemblables. Dans les deux cas, un diagnostic limité a été conduit (« pour voir », avant d’aller plus loin) à l’aide d’interviews, de questionnaires d’évaluation de la performance et de visites de terrain. Celui-ci a permis d’évaluer les faiblesses dans les 7 domaines précités et d’apprécier le niveau de sensibilité aux 6 risques externes précédemment évoqués.

Dans le premier cas, un défi majeur identifié par l’analyse croisée (voir tableau ci-dessous) est la maîtrise des effets de l’inflation sur la rentabilité à cause d’apparentes incapacités du commerce et du marketing d’augmenter les prix tarifs et de répercuter ces hausses aux clients. On remarque aussi qu’il manque de la cohésion au sein de l’équipe de direction pour mener l’exécution à bien et qu’enfin des carences au niveau du contrôle de gestion ne permettent pas de vérifier la mise en œuvre effective des ajustements de tarification décidés par la direction. On voit par ailleurs que la fonction financière ne brille pas sur de nombreux aspects relevant de sa responsabilité.

Premier exemple d’évaluation des risques

Dans le second cas, fort éloigné du premier, les deux défis prioritaires sont relatifs d’une part à la capacité des opérations de s’adapter aux problèmes d’approvisionnement sans faire bondir les coûts d’achat et les stocks et d’autre part celle de flexibiliser le staffing en fonction de la demande. De plus il apparaît dans cet exemple que la complexité de l’offre gêne l’approvisionnement des matières, ce qui exacerbe le problème précédent.

Second exemple d’évaluation des risques

Définir les premières actions pour parer au plus pressé

Malgré l’intérêt d’un diagnostic limité correctement mené, il est indéniable que les propositions pouvant découler des enseignements tirés à cette occasion ne peuvent prétendre à la précision. Faute de l’apport déterminant de l’analyse de la data, quantifier, même de façon approchée, l’impact des faiblesses relevées ou l’ampleur des gains potentiels nous paraît être un exercice hasardeux. Il n’en demeure pas moins qu’un tel diagnostic peut offrir quelques premières orientations de l’action, souvent acceptables pour parer au plus pressé. Ce diagnostic méritera malgré tout d’être amélioré ultérieurement, une fois l’urgence passée, par des analyses plus approfondies exploitant les données pour affiner les solutions trouvées et les compléter.

En outre, seul un diagnostic intégral permet de simuler l’impact des 6 risques externes dans différents scénarios (selon plusieurs profils d’évolution de l’inflation sur les deux prochaines années par exemple), car cela nécessite de construire une modélisation économique robuste de l’entreprise. Enfin, le diagnostic intégral est l’outil privilégié pour spécifier les transformations à opérer afin de métamorphoser l’entreprise en une “machine à résultats », capable de produire des flux soutenus de profits et de cash.